Flashback est une rappeuse indépendante aussi énergique que revendicatrice. Nous avons pu faire sa connaissance grâce au rappeur Hakim Norbert qui s’était déjà prêté au jeu de l’interview. Il nous avait parlé d’une rappeuse avec du talent, un constat partagé.
Quel est ton rapport à la musique ?
J’aime la musique depuis toujours mais je n’ai malheureusement jamais vraiment appris à jouer d’un instrument. Un peu de guitare à l’école, un peu de batterie par-ci par-là, rien de très sérieux. J’ai aussi fait quelques mix de musique électronique à l’époque quand j’étais en Bolivie. Ma vrai passion, ça reste le rap.
Depuis quand le rap est ton genre musical favori pour t’exprimer ?
Quand j’étais en Bolivie à la Paz, ma ville d’origine, j’ai commencé à faire du tag et du graff vers mes 15 ans. Là-bas, je baignais déjà dans la culture hip-hop. On sortait avec mes potes pendant la nuit pour taguer et graffer. On allait à des évènements rap ou de Drum’n Bass qui étaient organisés par des amis. C’est à ce moment-là que j’ai vraiment commencé à adhérer totalement au rap. J’ai passé des heures et des heures à découvrir des nouveaux sons sur Internet. A cette période, je ne faisais que du graffiti. Je n’étais encore qu’auditrice même si j’avais déjà écrit quelques textes.
C’est quand je suis arrivée en France, il y a 10 ans, que c’est devenu du sérieux. J’ai rencontré plein de gens dont beaucoup de rappeurs et de graffeurs. Il y avait une émulation qui m’a bien motivé. Vers 2012, je me suis posé avec une instru pour écrire vraiment. C’était sur un bon Big Katz de Godfather Don, je m’en souviens bien. J’ai sorti mon premier 16 mesures. A partir de là, je n’ai plus arrêté.
Mes gouts évoluent, mon rap aussi ! Depuis mes débuts, j’ai surtout fait du Boom-Bap. Mes influences sont plutôt New-yorkaises et des années 90. Forcément ça s’entend dans mes sons. Mais j’ai jamais voulu m’enfermer dans une case. Je kiffe aussi faire de la Trap à l’occasion. Et puis pourquoi pas faire du rap sur de la house ou de la techno.
Qui t’a marqué durablement en tant qu’artiste ?
La plupart de mes inspirations dans le rap viennent de la East Coast, New-York pour être plus précise.
Si je devais t’en citer quelque uns, je dirai comme ça : Nas, Big L, Big pun, Mobb Deep, Wu Tang Clan, Company Flow, Godfather Don, Ultramagnetic Mc’s et tant d’autres.
Ces derniers temps, j’écoute des artistes du label Griselda Records et du Joey Badass.
Je suis très rap français des années 90 comme Fabe, la Scred, les X-men, Lunatic … les classiques quoi ! Mais en vrai, j’écoute du rap de partout tant qu’il est bon, du rap anglais comme Blah records, du rap en espagnol comme Ariana Puello, et Makiza et même du rap hollandais, Her Verzet. J’aime la Techno et la House. Et quand ça me chante, j’écoute du Jazz : du Wayne Shorter et du John Coltrane. Je pense qu’on peut dire que je suis éclectique.
Ta philosophie de vie qui résonne dans ton rap ?
A vrai dire, je suis plutôt Ouigo que yacht, plutôt whole car que street-art. Plutôt open-mic que micro crochet. Plus sérieusement, ma grande passion c’est la musique et tout ce qui est en rapport au hip-hop. Un graff imposant en pleine rue ou un bon 16 mesures sur une instru qui claque … C’est ça qui m’anime. Mes sons reflètent bien ma personne. On y retrouve mes questionnements, mes frustrations ou encore mes délires. C’est un ensemble.
Tous les sons que j’ai fait depuis le début représentent des moments de ma vie partagée avec mes amis. Comme dirait Fabe, « ça fait partie de mon passé ». Le passé, il ne faut pas l’oublier ça nous donne des pistes pour avancer et évoluer. Sinon j’ai pas de rêves de grandeur dans le rap. Juste le besoin de profiter et de faire du son avec les gens que j’aime. Les rencontres, les voyages, les partages et les souvenirs … ça me va très bien !
Plutôt rap en solo ou rap en équipe ?
J’ai commencé le rap avec des amis, du coup c’est sûr que je suis plus dans le collectif. Le graff m’a aussi poussé à avoir une vision du crew. Je suis de l’école du rap au coin d’une rue avec tous mes acolytes. J’ai participé à pas mal de freestyles, de mixtapes et d’open-mic en clique. Alors oui, j’aime le fait de produire ensemble. Après, il y a une partie de la création artistique qui se fait forcément en solo : moi en feat avec mon stylo et mon papier… Alors en solo ou en équipe, pour moi l’un ne va pas sans l’autre, les deux sont complémentaires.
Le rap au féminin est toujours un peu marginal comparé au rap masculin, plus présent sur le devant de la scène. Même si ça change progressivement, comment tu le ressens en tant que rappeuse ?
Je trouve que le problème est de penser qu’il existe du rap féminin et du rap masculin. Des femmes il y en a toujours eu, dès débuts de la culture jusqu’à maintenant. Elles sont présentes à tous les niveaux du Hip-Hop, dans l’underground comme sous les projecteurs. Après des résistances, c’est sûr qu’il en reste, il ne faut pas se voiler la face. Je pourrais te citer un paquet d’anecdotes où des mecs te prennent de haut en croyant que c’est leur culture. Pour ma part, ça a plutôt tendance à me motiver de les remettre à leur place. C’est marrant parce qu’après quelques tags et textes bien placés, le ton est différent la plupart du temps.
Tu rappes où majoritairement ?
J’ai enregistré dans toutes sortes d’endroits et les vrais studios pro étaient plutôt rares. On a enregistré dans des chambres, dans des salles de bains. Partout, où il y avait moyen. Si on a le matos et l’envie de kicker, c’est l’essentiel. Après je cracherai pas sur une session en studio pro, mais pour ça faut de l’argent.
Si tu devais choisir des projets et des moments dont t’es le plus satisfaite, lesquels tu partages ?
Si je devais t’en citer quelques uns, je pense à mon premier album Mais qui t’invite que j’ai enregistré avec Tovee, 6ail, Sheuko à la prod et DJ Tshoperz au scratching lors d’une tournée à 14 en Suisse organisée par un pote parti trop tôt. Pour ce qui est des sons et des freestyles, je vous invite à aller voir sur le site mix-down.net, tout est disponible gratuitement. Sinon, des moments qui m’ont le plus marqués ? Ma date en Italie qui s’est terminée par un concert improvisé dans une autre salle et une block party à Barcelone où j’ai pu faire des bêtes de connexions sans oublier les autres dates organisées par des potes de Lille.
En ce moment, tu bosses sur quoi ?
Pas de projet de tournée en ce moment, juste quelques dates par-ci par-là. Certaines ne vont pas tarder à arriver et ça va être le feu. Du coup, restez à l’affut. Sinon tu me pourras me croiser dans les rues de Marseille en train de faire du rap avec la famille.